mercredi 30 janvier 2013

Cyril Aouizerate, stratège de la révolution vegan

Sous son chapeau melon, Cyril Aouizerate cache de multiples casquettes, dont celle d'un intello philosophe qui rêve d'un monde meilleur et a quelques idées pour y arriver.

Sensibiliser François Hollande aux bienfaits de la cuisine végétalienne ? Urbaniste et créateur de concepts de restaurants ou d'hôtels à succès comme MOB ou Mama Shelter, Cyril Aouizerate va tenter le coup. Il nous explique comment et nous parle de ses projets en France et aux Etats-Unis.


Comment et quand êtes-vous devenu vegan ?

Cyril Aouizerate : C’est une histoire d’amour qui a commencé voilà six ans. J’étais un gros mangeur de viande mais ma chérie, elle, est végétarienne depuis l’âge de douze ans. Ayant une formation de philosophe et regardant un peu ce qu’elle lisait, j’ai commencé à me demander si l’espèce humaine avait vraiment autant de droits que nous le prétendions sur les autres espèces. A partir de là, je suis vite devenu végétarien, puis vegan, mais en m’éloignant dès le début de l’argumentation militante.

C’est pourtant en faveur du veganisme que vous vous battez ?

C.A : Bien sûr. Pour moi le super héros d’aujourd’hui est végétarien ou vegan. Mais en France, contrairement aux Etats-Unis où je passe deux semaines tous les deux mois pour superviser MOB à New York, les hommes et femmes politiques ne parlent pas de végétarisme. Nous avons des Verts qui préfèrent s’en prendre au nucléaire plutôt que d’aborder la question de l’alimentation, où il serait pourtant plus facile d’obtenir des résultats.

Vous voilà soudain plus militant, non ?

C.A : Oui, mais je ne crois pas dans la  condamnation et dans la critique. Si nous voulons convaincre nos amis omnivores, montrons leur plutôt les incroyables créations de plats végétaliens d’Alain Senderens, conseiller culinaire de MOB, ou de Neal Harden, le chef du MOB à New York. Du reste, j’ai l’intention de faire livrer des lunch box de MOB lors d’un prochain conseil des ministres à l’Elysée. Il faut montrer que, face aux lobbies de l’élevage industriel, nous proposons une alternative et offrons une cuisine qui n’a plus rien à voir avec l’image que beaucoup de gens ont encore.

Quand lâcherez-vous les lunch box de MOB sur l’Elysée ?

C.A : En avril, à l’occasion de l’inauguration du prochain MOB à Paris, un établissement de 200 m2 et 150 places situé dans la nouvelle Cité de la Mode et du Design. Ce restaurant prendra la suite de celui de la rue Charlot, dans le troisième arrondissement, qui nous a servi de laboratoire mais s’avère trop petit.

Comment définiriez-vous le concept de MOB ?

C.A : Entre le petit restaurant militant et le restaurant végétarien super branché, il y avait de la place pour un concept inspiré du fast-food américain et intégrant la culture de l’entertainment. La première unité a ouvert en février 2012 à Brooklyn et comporte 150 places assises. En plus de l’inauguration parisienne d’avril, deux ouvertures sont prévues cette année dans Manhattan, à Union Square et Times Square. Toutes deux feront 80 m2 avec 50 places assises et de la vente à emporter. MOB est une chaîne qui trouvera son prolongement dans deux projets d’hôtels sur lesquels je planche à Paris et à New-York, des sortes de monastères laïques au prix abordable dont la cuisine sera, bien sûr, végétalienne.

Est-ce l’argent qui vous motive ou vos convictions ?   

C.A : J’investis beaucoup de mon argent et de mon temps dans MOB mais, quel que soit le projet, je travaille toujours sur une base idéologique. Nous sommes à une époque où, sans idéologie, rien n’est possible. Heureusement, le MOB de Brooklyn est aujourd’hui financièrement à l’équilibre après plusieurs mois de combat. Et nous avons lancé voilà trois semaines un hot dog qui fait un tabac.

Hum ! Est-il vrai que vous avez des idées très originales en matière de cuisine ?

C.A : Notre produit vedette, le MOB, est une sorte de pizza-bruschetta en forme d’arche du pont de Brooklyn, mais cela va beaucoup plus loin. Nous utilisons très peu le seitan et le tofu. Notre hot dog, par exemple, comprend de la polenta, des patates douces fumées et du riz finement mixé alors que le chorizo est fait avec un champignon coréen, la Trompette Royale, de la tomate séchée et un peu de vin rouge. Je suis super exigeant sur le goût et, en ce qui concerne le steak, nous avons passé huit mois avant de parvenir à un mélange de champignons, d’oignons, de riz et de tomate, très proche de la viande hachée au plan gustatif. La prochaine étape est un calamar vegan, à base de champignons, que nous lancerons cet été. Je suis un grand admirateur de Maïmonide, d’où le nom de MOB (Maïmonide of Brooklyn), philosophe et médecin médiéval qui prônait ce genre d'associations d’aliments.     

Le végétarisme, en France, reste très en retard sur les Etats-Unis ?

C.A : Pays de la malbouffe, les Etats-Unis sont aussi le pays où la cuisine végétalienne est la plus développée, c’est tout le paradoxe de cette culture. En France, je ne fais même plus attention aux sourires en coin quand j’affiche mes préférences alimentaires. Je suis néanmoins optimiste et nous considère comme des espèces de Jedi qui ferons prévaloir leur cause en étant les plus malins, c’est à dire en tenant un discours de séduction et d’amour, pas de culpabilité.


Le MOB de Brooklyn, un projet dans lequel Cyril Aouizerate s'est engagé seul, pour défendre ses idées vegan  et politiques comme il l'entendait.

Note :
Pour consulter le site web de MOB USA, cliquez ici.

Note personnelle :
Certaines des idées que défend Cyril Aouizerate correspondant exactement à celles de Léa Rystel, chef du restaurant végé La Dame Verte et héroïne de mon roman sur le végétarisme, Le Vert et le Rouge (voir ci-contre), je ne résiste pas à la tentation de me faire un peu de pub.


8 commentaires:

Sébastien Kardinal a dit…

J'aime beaucoup la conception de Cyril. C'est exactement ce type de démarche qui peut réellement faire avancer les choses ici ou ailleurs.
Le militantisme agressif et culpabilisateur que l'on connait en France est pour beaucoup de gens contre-productif. Alors qu'aborder le véganisme par le biais positif du plaisir et de la qualité, hors de tout clivage idéologique semble la voie suprême. C'est d'ailleurs comme ça que l'on voit les choses sur VG-Zone. ;)

Yara Dutra a dit…

Adorei a entrevista! Estou de acordo com o Cyril Aouizerate (assim como com a opiniao de Kardinal) que é preciso evitar a condenaçao e a crítica. Assim podemos seduzir os omnívoros com propostas originais (e saborosas) como estas bruschettas em forma de arco da ponte de Brooklyn :)
Desejo muito êxito a MOB no próximo conselho de ministros no Elysée! Ficaria muito contente que no Elysée incorporassem cada vez mais pratos veganos nos seus menus :)
Tal e qual... A mesma estratégia que Léa Rystel na tua novela ;)

vegeshopper a dit…

Obviamente, so posso estar de acordo com a Yara e o Kardinal ;-) E gostei muito de entrevistar o Cyril, uma pessoa com muitas coisas interesantes para contar.

Deborah Brown Pivain a dit…

C'est un bonheur de voir le veganisme se répandre a travers Paris - grace au travail de tous les différents acteurs engagés dans cette incroyable voie juste et compatissante !

vegeshopper a dit…

It's a long way, mais il est vrai que le choses vont dans le bon sens, Deborah.

Lisa a dit…

Super interview! It's great to see so much happening on the vegan scene in both the US and France! Can't wait to try the new restaurant.

Anonyme a dit…

SUPER!!!! :)

vegeshopper a dit…

Il a des idées qui décapent, n'est-ce pas ?

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