En fait de vague végétarienne, voilà un raz-de-marée de lieux communs et d'idées reçues. |
Taper sur un végétarien chaque fois que l’on s’en prend à un carnivore est devenu un sport à la mode. Le dossier consacré cette semaine par l’hebdomadaire Le Point à la viande, très décevant, en fournit un nouvel exemple.
Si quelque chose
m’agace, c’est bien le politiquement correct. Ce discours qui vise à ne pas
déplaire et à ne froisser aucune susceptibilité, présente en effet l’inconvénient
d’égaliser par le bas en mettant tout dans le même panier. A cause de lui, impossible
d’émettre un jugement sur une politique sans s’en prendre à toutes les
politiques, sur une religion sans s’attaquer à toutes les religions, etc. Sous
prétexte d’éviter les conflits, ses
zélotes cherchent en fait à donner d’eux une image la plus consensuelle et la
plus flatteuse possible, tuant dans
l’œuf tout débat, toute remise en question, toute autocritique.
Dans le domaine
de la nutrition, le politiquement correct s’exprime par des phrases comme « aucun
aliment n’est mauvais par nature, tout dépend de la quantité et de la
qualité » ou « il faut manger un peu de tout ». Cela permet aux nutritionnistes les moins scrupuleux, qui ont carte
blanche sur nos antennes, de se nourrir à tous les râteliers… Pourtant, je me demande si le débat sur les
méfaits de la viande et sur les vertus de l’alimentation végétale, pour ne pas dire
végétarienne, n’est pas pratiquement « plié ».
Il suffit de
regarder autour de soi pour s’en convaincre. Par exemple, j’ai entendu
dernièrement mon père, membre de l’Académie d’Agriculture, et mon cousin,
gastroentérologue, vanter les mérites pour l’environnement ou pour la santé d’une
réduction significative de la consommation de viande, quelque chose
d’inimaginable voilà encore deux ans ! Le passage de la théorie à la
pratique prendra peut-être du temps, mais un
consensus scientifique semble se dessiner en faveur d’une alimentation plus
végétale, une véritable lame de fond dont nous mesurons mal les
conséquences.
De là à crier
victoire, les végétariens feraient bien de se méfier. Après avoir été considérés comme des empêcheurs de manger en rond
acariâtres mais inoffensifs, nous risquons de devenir les victimes collatérales
du nutritionnellement correct. Autrement dit, plus il deviendra de bon ton de taper sur les
carnassiers, plus les végétariens en prendront aussi pour leur grade afin d’équilibrer
les plateaux de la balance.
Vous en
doutez ? Alors lisez (ou ne lisez pas plutôt) Le Point de cette semaine. Le débat autour de la viande est présenté
comme une « nouvelle guerre de religion » où les végétariens seraient
les « ayatollahs du soja » et où le prosélytisme pro-végé de
Marcela Lacub, auteur de Confessions d’une mangeuse de viande (Fayard), risque
effectivement de nous faire passer pour une bande d’illuminés larmoyants. Ce alors que cet
article n’est qu’une compilation de tous les arguments, déjà archi-connus, contre
l’élevage intensif !
Quand nous
présentera-t-on enfin comme des gens normaux ? Quand, au lieu d’enfoncer des clous dans le cercueil de l’industrie de
la viande, montrera-t-on les bons côtés du végétarisme et du véganisme ?
Je reviendrai très bientôt sur ce sujet avec un post sur le livre d’Aymeric Caron, No
Steak (Fayard), à paraître le 16 janvier. Pour en revenir au débat de fond, si nous avons eu raison
avant tout le monde, comme je le pense, attendons nous à payer le prix fort
pour ce crime si politiquement incorrect. Bonne année quand même !
8 commentaires:
Bonjour !
Je suis tout à fait d'accord avec vous. J'ai acheté "Le Point" hier, pour lire ce dossier et j'ai été un peu déçu de voir simplement un agrégat d'arguments sans réelle enquête sur les végétariens que nous sommes... On tombe vite dans le consensus mou, où, pour déculpabiliser les omnivores on leur dit "mangez de la viande, mais de la bonne et pas trop souvent" ce qui reste très superficiel !
Ouf ! Merci Little Yellow Fish, je suis soulagé de voir que je ne suis pas le seul à avoir été déçu, voire un peu irrité, par cet abordage très superficiel de la question.
Je suis bien d'accord.
Dommage...
Est-ce surprenant ? Je n'ai pas le souvenir d'avoir lu un article éclairé traitant objectivement du végétarisme depuis des lustres. Je n'inclus pas les articles rédigés par des VG bien-sûr... ce serait de la triche. :)
Ana
http://information-vivisection.over-blog.com
Magtuelonne, je trouvais ton commentaire intéressant, pourrait-on le remettre ?
c'est ce qui me fâche un peu aussi.. d'avoir dans la presse courante toujours un mi-ton, ou alors de la raillerie..
les seuls articles intéressants vegan que je lis sont sur les blogs, sites, medias écrit par des vegeta*ien..
du coup, quand je les cite pour exemple on démonte toujours mes arguments par le fait que ceux qui l'ont écrit ne sont pas "ouvert" d'esprit et sont obnubilés par leurs avis...
et je rencontre beaucoup de gens qui se sont tellement fait matraqués par des végé à coup de "vous mangez de la viande, vous êtes des gros cons" que ça décrédibilise toute tentative de discussion...
(ceci étant dit, je consomme encore bien des produits animaliers, en petite quantité et pas trop souvent.. alors peut-être n'aurai-je point de crédit ici ;) )
Non, bien sûr, tu as autant de légitimité qu'un végétalien pur et dur pour t'exprimer sur mon blog. Concernant le reportage du Point, je pense que nous partageons tous ton impression, à savoir que seuls les VG parlent bien du végétarisme. Mais il faut reconnaître aussi que les médias ne laissent plus de temps aux journalistes pour "creuser" vraiment les sujets, ce qui est à l'origine de beaucoup de traitements superficiels.
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